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Cecco d'Ascoli: L'Acerba
(Livre I)

traduction et commentaire Marie-Claude Ramain


Note Patrice Guinard: Le poème didactique de l'Acerba, de Cecco d'Ascoli, n'avait jamais été traduit en français à ma connaissance. De plus l'original italien semble introuvable sur Internet. C'est donc une première, et une exclusivité du CURA. Je remercie chaleureusement Marie-Claude Ramain pour son travail colossal et désintéressé, lequel met à disposition des astrologues et des médiévistes, cette fresque philosophique et morale,  toute empreinte d'une conception astrologique du réel. Ainsi la double injustice faite à Francesco Stabili -- son procès truqué et sa maigre postérité -- sera-t-elle partiellement compensée par cette publication.
 

 Aperçu sur la vie de Cecco (1269-1327)
 Acerba: Livre I
 Acerba: Livre II
 Acerba: Livre III
 Acerba: Livres IV et V

 
 

Aperçu sur la vie de Cecco (1269-1327) par Marie-Claude Ramain

    Francesco Stabili, dit Cecco d'Ascoli, serait né près d'Ancarano, dans la région d'Ascoli Piceno, en 1269.[1]  Son père, Simone, noble mais pauvre, aurait eu un autre fils, Cola di Simone ou Cola di Cecco (à moins que ce ne soit le fils de Cecco).

    Nous ne savons rien de ses études ; les affirmations de Castelli selon lesquelles il aurait étudié la grammaire dans sa ville jusqu'à l'âge de quinze ans, puis serait allé à Salerne " faire sa médecine ", ne sont confirmées par aucun document et ne relèvent que de la simple logique.

     Il est en effet habituel, à cette époque, de faire son trivium dans une école proche de son domicile et d'aller ensuite poursuivre ses études dans une ville où la faculté qui intéresse l'étudiant, jouit d'une bonne renommée ; or pour Cecco, Salerne (bien que déjà sur le déclin à la fin du XIIIe siècle) représente l'école de médecine la plus proche de son domicile. Son passage à Paris est également très hypothétique et ne repose sur aucun témoignage mais seulement sur les supputations d'auteurs modernes; cependant, s'il avait eu lieu, il prouverait avec certitude que Cecco connaissait les enseignements de saint Thomas d'Aquin qui y circulent en cette fin de XIIIe siècle, ce qui serait d'un grand intérêt pour l'étude de sa conception du libre arbitre présentée dans l'Acerba.

      Un document des archives de Bologne, daté du 17 juillet 1318 [2] , atteste de sa présence en cette ville, et nous le montre sous un aspect qui ne laisse en rien présager du texte moralisant de l'Acerba : celui d'un étudiant, partageant son logement avec d'autres étudiants dans la tradition des Goliards. Que s'est-il donc passé à Bologne en cette soirée du dimanche 17 juillet ?

    Après le souper, pris dans sa pension, située via Valdaposa, dans la paroisse de saint Mamolo, survient un étudiant signalant qu'il avait vu trois femmes accompagnées d'un homme qui venaient de la porte saint Mamolo, et qu'il y avait " un bon coup à faire ".

     Armés jusqu'aux dents, quelques étudiants sortent alors pour enlever " ces dames " qu'ils avaient prises pour des prostituées, accompagnées de leur souteneur ; or, l'homme est le mari de l'une d'entre elles et se bat pour qu'elle ne soit pas enlevée ; il s'ensuit une rixe au cours de laquelle pleuvent les coups de bâtons et les coups de couteaux. Débordés par le nombre de voisins accourus pour porter secours au petit groupe, les étudiants s'enfuient jusqu'à leur pension. Les sbires de la commune, appelés à la rescousse, trouvent cinq étudiants dans la pension de la via Valdaposa, dont Cecco d'Ascoli et son serviteur, Thomas de Monflex. Conduits au palais du podestat, ils y restent en garde à vue jusqu'au lendemain, où débute le procès.

    Les témoignages prouvent que Cecco n'a pas pris part à la bataille, mais il confesse lui-même avoir donné refuge, dans sa propre chambre, à l'un de ses camarades, Pietro de Lulixana (accusé d'avoir tiré son couteau lors de l'échauffourée), et d'avoir vu fuir Giovanni de Cortona, blessé à la joue, par un trou dans le mur de la cuisine.

     Ce document nous montre Cecco en joyeuse compagnie, par goût ou par nécessité ; cette pension, avec son trou dans le mur de la cuisine n'a rien de luxueux et dénote (bien qu'il ait un serviteur) l'état de pauvreté dans lequel vit Cecco. Le titre de ser Cechum Marcha que le document emploie pour le désigner, alors que les autres étudiants en médecine sont appelés " maître ", ne semble pas prouver qu'il ait été notaire, mais ressemble plutôt à un titre honorifique, attestant d'études plus avancées que celles de ses camarades de pension.

    Dans un deuxième document, daté du 18 mars 1324, il apparaît de nouveau comme témoin d'un procès, pour confirmer qu'un étudiant en médecine, Nicolas de Ravenne, est bien étudiant à Bologne depuis plus de deux ans ; cette fois il est désigné sous le titre de maître.

      Un troisième document, du 18 mai 1324, présenté par F. Fillipini, prouve qu'il est professeur d'astrologie à l'université de Bologne pour un salaire de 100 livres bolognaises par an. Ce document fait état de la régularisation des salaires es enseignants assurant les cours extraordinaires de l'après-midi. Cette année-là, intervient en mars une réforme qui interdit aux frères du couvent de saint Giacomo, trésoriers de la commune, de payer les professeurs sans qu'ils y soient autorisés par une délibération préalable du conseil de la commune, ceci pour limiter les abus dans le choix et le nombre des professeurs " extraordinaires ".

    Nous ne pouvons donc pas interpréter ce document comme indiquant la première année d'enseignement de Cecco ; il est même vraisemblable que le médecin-astrologue enseigne déjà depuis plusieurs années au studium.

    Ses relations avec des personnages célèbres ne nous offrent pas plus de renseignements sur sa biographie. Le sonnet de Cino da Pistoia " Cecco, io ti prego per virtù di quella... " est adressé à l'astrologue pour lui demander un conseil, mais ne nous renseigne nullement sur la date à laquelle il fut écrit.[3]  Florence accorde la citoyenneté à Cino en 1324, et si cette ville est représentée par l'image " du bel fiore ", cela situe la relation de Cino et Cecco en 1324 ou en début d'année 1325, c'est-à-dire avant la nouvelle année universitaire sur laquelle porte l'hésitation du quémandeur. Les deux hommes se sont vraisemblablement rencontrés à Bologne, l'année universitaire 1323-1324, pendant laquelle Cino est le maître de Pétrarque ; la renommée de l'astrologue, également enseignant à Bologne, incite Cino à lui demander conseil.

    Une relation directe avec Dante est attestée par le passage de l'Acerba où l'auteur rappelle que Dante lui a posé des questions sur le cas de jumeaux, dont le premier né est mieux constitué que son frère :

II. 1439-1444
"Mais ici m'écrit Dante, m'exposant ce doute :
soient deux fils nés d'un même accouchement,
le premier se montre le plus noble
et l'autre moins, comme tu l'as déjà compris.
Je m'en retourne à Ravenne, d'où je ne partirai pas :
dis-moi, Ascolan, ce que tu en penses."
[4]

    Mais Dante a quitté plusieurs fois Ravenne pour y revenir par la suite, ce qui ne nous permet pas de dater cette correspondance.

      La femme pour laquelle souffre le poète (Acerba, IV, 3777) n'est pas comparable à la Béatrice de Dante, elle paraît beaucoup plus charnelle et malgré tous les sarcasmes dirigés contre les femmes que contient le poème, on sent son auteur incapable de se détacher de cette femme-là ; mais qui fut-elle ? [5]

    L'oeuvre de Cecco fait plusieurs fois référence aux moniales ; celui qui est né sous le signe de Vénus parle à voix basse comme les religieuses ; de même pour une certaine position de Vénus, l'homme peut-être sûr d'être aimé " comme notre ascolan parmi les moniales de sainte Marguerite " [6]  ; doit-on voir dans cette phrase une allusion, comme le fait Fillipini, à des prouesses amoureuses parmi les soeurs de sainte Marguerite qui avaient un monastère non loin de sa maison ?

      Doit-on prendre en considération la lettre citée par F. Novati, que Cecco aurait envoyé à une clarisse, soeur Lucie ? Ou ne s'agit-il que d'un faux à porter au crédit de ses ennemis ?

      Autant de questions sur sa vie privée qui restent sans réponse. Ses allusions aux religieuses lorsqu'il est question d'amour, ses relations d'étudiant, qui comme nous l'avons vu sont pour le moins peu recommandables, laissent supposer qu'il n'y a pas " de fumée sans feu " et expliquerait mieux l'acharnement des frères franciscains à le faire retomber dans les filets de l'inquisition.

L'après-midi du 10 septembre 1327, à Florence, entre la porte a Pinti et la porte alla Croce, se dresse un bûcher ; les veines du front taillées, Cecco y est brûlé .

    Comment le célèbre médecin est-il passé de la renommée incontestée de ses premières années d'enseignement à Bologne, aux flammes de l'Inquisition ?

      Les raisons semblent être multiples. En 1324, alors qu'il commente la Sphère de Sacrobosco à ses étudiants, le dominicain Lamberto da Cingoli l'accuse de " mal parler " de la foi catholique ; il lui impose une confession générale dans les quinze jours et lui donne une pénitence de trente Pater, trente Ave Maria (à réciter chaque jour) en plus, il doit aller écouter les prêches chaque dimanche, soit chez les dominicains, soit chez les franciscains. En outre, ses livres sont mis sous séquestre et confiés à un certain maître Albert ; l'enseignement public ou privé de l'astronomie lui est désormais interdit et par conséquent il ne peut plus bénéficier des droits et honneurs de cette charge. A cela, il faut ajouter 70 livres bolognaises d'amende, ce qui correspond au trois-quart de son salaire d'une année de lecture d'astronomie.

    En 1325, la défense d'enseigner est levée, peut-être pour ne pas provoquer des incidents avec les étudiants qui étaient nombreux à apprécier son enseignement ; il abandonne alors le commentaire de la Sphère pour celui du De Principis Astrologiae d'Alcabiz, mais en y ajoutant des références à son commentaire de la Sphère.

      A la même époque, Florence essaie d'attirer les universitaires les plus prestigieux pour développer son université, comme nous l'avons vu pour Cino da Pistoia ; de plus, Ascoli et Florence sont en bons termes alors que le mépris des florentins envers les bolognais est grand comme en témoignent certaines nouvelles du Decameron. Il n'y a donc rien d'insolite à retrouver Cecco à Florence, occupant le poste de médecin-astrologue du duc Charles de Calabre, entré dans la ville le 30 juillet 1326, accompagné de sa fille Giovanna, âgée de deux ans.

      Que se passe-t-il alors ? Comment expliquer un tel revirement de fortune ? Selon Giovanni Villani, deux explications sont à retenir : une première d'ordre astrologique et théologique sur laquelle nous reviendrons et une deuxième liée à la jalousie ou à la vengeance de Dino del Garbo. Le grand orgueil de Cecco, peut-être même sa vanité, qui se dégage de l'Acerba, laisse supposer qu'il est le plus savant de tous les médecins de son temps et qu'il détient la Vérité ; or, à Bologne, Cecco aurait publiquement au cours d'une leçon, ridiculisé le médecin florentin Dino del Garbo, en l'accusant d'avoir plagié un commentaire d'une oeuvre de Galien fait par un de ces collègues décédé, maître Torrigiano. A Florence, il est dans le fief de la famille Del Garbo qui devait aspirer à se venger ; d'autre part, sa place auprès du duc de Calabre doit être très convoitée.

      Comme le mentionne la Cronaca Fiorentina, le duc n'a-t-il pas voulu se venger des prédictions faites par l'astrologue au sujet de sa fille Giovanna ? La charge d'astrologue de cour oblige Cecco à faire l'horoscope des enfants du Prince ; or, il prédit que la future reine de Naples sera encline aux débordements sexuels, prédiction qui justifierait la colère du duc. Dans quelle mesure pouvons nous accorder foi à cette affirmation ? Le duc et la duchesse mènent eux-mêmes une vie de débauche, sans aucun souci de l'opinion publique, alors peuvent-ils être offensés par les prédictions de leur astrologue ? La légende ne s'est-elle pas emparée de la réalité d la vie de la reine Jeanne pour dicter un horoscope " a posteriori " ? Ou bien Cecco n'a-t-il pas formulé cet horoscope par référence à la vie dissolue du couple ducal sur lequel la fillette ne pouvait que prendre modèle ? Cette dernière hypothèse expliquerait la colère du duc qui se serait senti jugé par un subalterne.

      Nous ne devons pas non plus oublier que les vers de l'Acerba dirigés contre Dante doivent être connus au moins de quelques uns. Bien que les florentins aient banni l'Aligheri, il n'en est pas moins le Poète ; aux haines personnelles de la famille del Garbo et du duc de Calabre s'ajoutent le mépris et la colère des intellectuels florentins. Tous les morceaux d' "un puzzle de la vengeance " sont en place, il ne reste plus qu'à trouver la main qui les assemblera. Ce rôle est assumé par un franciscain, frère Accursio, l'évêque d'Aversa, qui déclare Cecco relaps, le condamne au bûcher et fait détruire ses oeuvres : son Commentaire à la Sphère de Sacrobosco, son Commentaire d'Alcabitius (De principiis astrologiae) et l'Acerba. Les motifs invoqués remontent au premier jugement de 1324 dont l'inquisiteur florentin reçoit les minutes le 17 juillet 1327.[7]

      Rien dans les écrits de Cecco et de sa vie à Florence ne motive cette réouverture du procès. L'astrologie en elle-même n'est pas condamnée par l'Eglise, et la condamner reviendrait à condamner tous ceux qui suivent l'enseignement de Cecco, dont le recteur de Florence ; c'est même un savoir auquel s'adonnent les princes et les papes. Seul reste le motif du retour à l'erreur première, mais notre médecin-astrologue est trop intelligent pour y revenir délibérément ; comprenant cela, ses ennemis organisent un complot pour provoquer le délit qui va aboutir à la réouverture du procès : un citoyen florentin l'accuse de l'avoir renvoyé, au cours d'une discussion privée, à son Commentaire de la Sphère, déjà condamné à Bologne ; c'est devenu un récidiviste !

      Les chefs d'accusation théologique, prononcés à Bologne, sont donc repris ; cependant le seul exposé que nous en possédions est celui de la Cronaca des frères Villani. Le premier chef est d'avoir affirmé que l'on pouvait, sous certaines constellations, contraindre par des incantations les esprits malins des sphères supérieures à accomplir des choses extraordinaires ; il peut donc y avoir un pacte entre l'homme et le diable pour que le premier usurpe la puissance divine, ce qui en soi, suffit à justifier la condamnation de l'Eglise. A côté de cela, la croyance à l'existence d'esprits malins dans les sphères supérieures se rapproche de la croyance des Patarins pour lesquels Satan est monté au ciel pour pervertir un certain nombre de créatures angéliques avec l'aide d'une femme qui a éveillé leur concupiscence (Cecco dans l'Acerba se montre profondément hostile aux femmes qu'il accuse d'être les pires pécheresses) et qui, de ce fait, empêche toutes ses consoeurs de pouvoir accéder un jour au royaume de Dieu. Les Cathares français sont venus s'installer en Italie lorsqu'ils étaient persécutés dans le Midi de la France ; des liens étroits se sont établis de part et d'autre des Alpes et l'hérésie s'est largement diffusée sur tout le Nord de l'Italie, la Lombardie du XIIIe siècle et à Florence même.

    Une autre des caractéristiques des Patarins est de toujours être associés aux Gibelins dans leur lutte contre l'église catholique ; la répression est sévère pendant tout le XIIIe siècle et la prédiction de l'astrologue sur la venue de l'empereur d'Allemagne, Ludovic, a certainement réveillé de vieux démons que l'Eglise ne peut que réprimer à l'aide de l'outil créé dans ce but : l'Inquisition ; et bien malgré lui, car on ne peut accuser Cecco de catharisme pur, il a pu être la victime d'un combat d'arrière-garde.

    La deuxième accusation porte sur la prédiction de la naissance du Christ, en accord avec la position des astres ; Albert le Grand l'a également affirmé avant lui, sans que cette position soit condamnée par l'église catholique.

    La troisième accusation concerne la prédiction de la venue de l'Antéchrist, au moyen de l'astrologie ; examinons ce qu'il nous en dit dans l'Acerba :

V. 4767-4770
"Ce qui commence à un moment, à un moment meurt ;
les mouvements du monde, passant et se renouvelant,
on s'approche ainsi des dernières heures."

     Ces vers nous montrent qu'il croyait à la fin du monde ; le ciel perd peu à peu de son pouvoir primitif et dans les vers qui suivent, il affirme que le ciel aura complètement disparu lorsque chaque étoile de la huitième sphère sera retournée à son point de départ. Dans le premier quart de leur course est né Moïse, dans le second le Christ, dans le troisième viendra l'Antéchrist et dans le quatrième, l'influence céleste aura tellement diminuée que ce sera la fin du monde. Bien que ce texte ait été écrit en prison et qu'il n'entre pas dans les écrits visés par l'Inquisition, il est possible que l'idée qu'il exprime ait fait partie du Commentaire à la Sphère de Sacrobosco et que son absence du texte qui nous est parvenu soit due à la correction apportée après le premier procès, à Bologne.

      Que sont ces autres choses contraires à la religion auxquelles Villani fait allusion ? Sa croyance à l'astrologie judiciaire ? Sa réputation de nécromancien ? Il est très difficile de le savoir car la légende s'est très vite emparée du personnage. La force de caractère dont il fait preuve est attribuée à des forces infernales ; on affirme également que, par magie, sa tête se serait séparée de son corps alors qu'un barbier le rasait, pour se poser sur le sol à côté de lui.

      L'image que les siècles suivants ont de lui, est celle d'un damné terrassé par Dino del Garbo, représenté dans une fresque d'Orcagna en l'église même où il fut condamné, à Santa Croce.[8]

      Fermement convaincu de la science qu'il professe, contrairement à ce qu'affirme la légende, il ne tombe jamais dans la magie qu'il considère comme un art ténébreux exercé par des esprits diaboliques ; la magie noire n'a aucun rapport avec la science qui est son seul but. De même, nous devons admettre qu'il ne perd pas une occasion, dès le début du texte de l'Acerba, de se montrer ardent défenseur de la foi catholique.

     Pourquoi est-il le seul " homme de science " à finir sur le bûcher ? Les inimitiés personnelles auraient pu conduire à son assassinat, mais en formulant par écrit, des pensées que d'autres se contentent d'énoncer sous le manteau ou de mettre en pratique sans les énoncer, il a prêté le flanc aux attaques de l'Inquisition, permettant ainsi à ses ennemis de le faire assassiner légalement.

      Savant et passionné, il est allé se jeter dans la gueule du loup ; nous pouvons sous demander s'il a été naïf ou si, persuadé de posséder la Vérité, il a préféré l'affirmer jusqu'à la mort plutôt que de composer avec les autorités religieuses comme le fera Galilée, en désavouant ses propres certitudes.[9]
 


[1]  CASTELLI (Giuseppe), La vita e le opere di Cecco d'Ascoli, Bologne, Zanichelli, 1892, p.22. « Texte

[2]  FILLIPINI (F.), Cecco d'Ascoli a Bologna, in " Studi e memorie per la storia dell'università di Bologna", 1930. « Texte

[3]  ZACCAGNINI (Guido), Cino da Pistoia, Pistoia, Pagnini, 1918, p.115. « Texte

[4]  CRESPI (Achille), L'Acerba di Francesco Stabili, Ascoli Piceno, G. Cesari, 1927. « Texte

[5]  NOVATI (F.), Tre lettere giocose di Cecco d'Ascoli, in " Giornale storico della letteratura italiana ", vol. 1, 1883, p.62-74. « Texte

[6]  FILLIPINI (F.), Op. Cit., P.24. « Texte

[7]  CASTELLI (Giuseppe), Op.Cit., p.31 « Texte

[8]  VASARI (Giorgio), Le vite de'più eccelenti pittori scultori e architettori V.I, Milano, Edizioni per il Club de Libro, p. 468. « Texte

[9]  Note P.G.: Cecco est mort sur le bûcher pour être resté fidèle à ses idées, pour avoir manqué d'appuis politiques et avoir négligé et méprisé la vilenie de ses adversaires personnels, obscurs rouages de la machine inquisitoriale. Theodore Wedel note que "L'esprit qui a permis à Cecco d'Ascoli d'affronter l'Inquisition était beaucoup plus émancipé que celui qui animait ses inquisiteurs." (in The mediaeval attitude toward astrology, New Haven, Yale University Press, 1920, p.153). Et Thorndike: "La condamnation de Cecco est un bon exemple de la façon par laquelle l'Inquisition a pu être manipulée à des fins personnelles, mais elle n'apparaît pas annoncer une quelconque attaque, par l'Eglise et par l'Inquisition, [à cette époque], de l'astrologie ou des savants ayant montré de l'intérêt pour la science occulte." (Lynn Thorndike, A history of magic and experimental science, vol. 2, New York, Columbia University Press, 1923, p.968). Voir aussi:

- Giuseppe Boffito: "Perchè fu condannato al fuoco l'astrologo Cecco d'Ascoli?", in Studi e Documenti di Storia e Diritto, Anno 20, Roma, 1900.
- Carlo Lozzi, "Cecco d'Ascoli: saggio critico e bibliografico", in Bibliofilía, 4-5, 1903.
- Lynn Thorndike, "Relations of the inquisition to Peter of Abano and Cecco d'Ascoli", in Speculum, 1, 1926.
- Lynn Thorndike, "More light on Cecco d'Ascoli", in The Romantic Review, 37, 1946.
- Marcello Aurigemma, "Interpretazioni dell'opera di Cecco d'Ascoli dal Trecento a oggi", in Atti del primo Convegno di Studi su Cecco d'Ascoli (1969), 1976.
- Manfred Bambeck, "Zur polemik des Cecco d'Ascoli gegen Dante oder von der Allgegenwart der Allegorese", in Romanistisches Jahrbuch, 31, 1980. « Texte
 


Acerba I. 1

DE L'ORDONNANCE DES CIEUX

1-
Notre compréhension ne franchit pas
la limite de ce premier mobile
d'où, sous l'effet de son pouvoir, la nature nous envoie
cette forme d'intelligence qui nous distingue des animaux
par son origine supérieure,
et que jamais créature ne vit en entier.

7-
Au-dessus de chaque ciel, là où la bonté divine ne ferme pas les yeux,
grâce à la douce harmonie,
les substances incorporelles sont bienveillantes ;
par la puissance d'un tel pouvoir
elles gouvernent la ronde de chaque sphère
et ainsi recevons-nous la vie.

13-
L'arc aux multiples lumières
tourne en dessous, entraînant dans sa course ses étoiles dociles
dont les dernieres lui font perdre un bon degré.
Il donne naissance aux quatre qualités
qui commandent les actions des hommes,
car il les gouverne de sa douce loi.

19-
En dessous brille cette étoile
à la course lente et ennemie de l'activité
dont jamais le rayon n'engendra de belles choses.
Son souffle froid envoie le gel sur la Terre;
et si elle agit sur qui n'éprouve pas de pitié,
l'air retentit de stridents "guerre, guerre ".

25-
Le sixième ciel contient la bienveillante lumière
et l'on voit celui qui en porte les marques,
le prouver par de bonnes actions.
Si l'âme ne ferme pas ses beaux yeux,
en les cachant à notre pensée,
il la bercera de ses bras nus.

31-
L'étoile brûlante qui tourne en dessous,
ne reflète pas la pitié mais de merci
se montre toujours froide envers qui la provoque ;
et sa puissance répand dans l'air une telle tempête,
que de nos jours nous voyons clairement
que le monde entier est sous sa domination.

37-
Puis tourne le corps céleste, source de notre vie,
origine universelle de tout être vivant ;
et sa puissance accentue tant la morsure
de ses rayons ardents que la lourde qualité reflétée
en lui se réchauffe
et alors leur puissance fortifie ce qui vit.

43-
L'étoile de la troisième sphère, par sa lumière,
donne à l'âme l'angoisse d'amour
pour une beauté, qui ne quitte pas
cette âme, même si la mort en éteint le visage.
Une nature en qui le doux rayon
ne resplendit pas, n'est pas chose vivante.

49-
La planète à la double volonté tourne
sur cette sphère d'où provient une lumière telle,
qu'elle dépouille l'âme de toute obscurité.
Sur ce petit cercle, l'étoile froide
tourne la dernière et il n'est pas vrai qu'elle fasse
disparaître son ombre sous l'effet d'une lumière excessive.

55-
Toute lumière que possède le ciel
provient de cette source que la nature première
forma pleine d'un zèle amoureux,
de sorte qu'elle fait resplendir chaque étoile ;
mais la dernière est la plus haute,
et en s'éloignant de cette source, elle ne reçoit plus sa lumière.

61-
Et lorsqu'elle tourne parmi les rayons solaires,
elle affaiblit la force des vivants,
l'air se transforme en tempête,
elle assèche les fleuves et chasse toute vertu ;
une épée ennemie prive d'honneur
ceux qui conduisent les étendards sur le champ de bataille.

67-
Lorsque son étoile brille à l'orient
alors qu'elle se trouve dans le huitième signe,
à une telle puissance elle ne peut résister ;
si l'autre étoile tourne à son zénith
la preuve se verra dans les figures peintes dans l'air
et dans le vol de ce qui est recouvert de plomb.

73-
Elle meut les corps inférieurs
et met en fuite ceux dont la nature
ne peut être semblable à sa perfection ;
à notre vue elle trouble leur beau visage :
dans la lunette elle les peint nébuleux
et avec beaucoup de plaisir, elle prive son fils de lumière.

79-
Les autres animaux, ceux qui sont privés de raison,
subissent toujours une parcelle de son influence.
Ô grande force qui transforme toute chose !
Ô combien se manifeste ton pouvoir
toi qui veux que chaque nature se tempère
pour rendre notre vie plus douce,
ô toi qui montres le troisième ciel en une forme
et enflamme de pitié la lourde loi.
 

Acerba I. 2

DES SUBSTANCES SÉPARÉES ET DE QUELQUES UNS DE LEURS EFFETS

87-
Les intelligences séparées sont la cause
du mouvement de ces roues;
elles sont proches de la divine splendeur,
elles ne cessent de mouvoir leurs sphères avec puissance,
et nos esprits ne peuvent restés cachés
à ces intelligences resplendissantes de vertu.

93-
Les astres et leurs différentes sphères
poussent les personnes à accomplir des actions diverses
et exercent leur pouvoir de telle sorte qu'il ne disparaît jamais.
ceux qui sont privés de vertu,
ceux qui sont soustraits à son action,
ceux qui sont enveloppés par l'erreur,

99-
Ceux qui tirent leur puissance de leurs armes,
ceux qui sont entachés de vilenie,
ceux qui portent des coups à leur semblable,
ceux dont la voix clame toujours :
" ô tyrannie, ô bonne chose "
n'ont cure d'être renommés pour leur vertu.

105-
Mais l'âme noble, semblable à celle du Créateur,
par sa valeur peut leur faire de l'ombre
si sa noble valeur ne faiblit pas ;
lorsqu'elle est soumise à l'influence de ces autres [astres],
et s'il ne font pas péricliter sa vertu,
alors elle est supérieure à toutes les étoiles.

111-
Les puissances qui meuvent les cercles sont au nombre de neuf
et certains en ont placé une autre en dessous d'elles
qui inspire les actes supérieurs.
Cette intelligence venant du monde terrestre,
par sa bienveillance nous donnerait notre forme
en prenant notre âme dans le second ciel.

117-
Ce serait une âme unique qui serait en chacun,
et qui serait sous le cercle de la première étoile ;
et d'une autre vie nous serions privés et exclus ;
Averroès émit cette fausse idée
dans sa doctrine sophistiquée et erronée,
mais elle n'a pas plus de valeur que ce qu'a duré sa vie.

123-
Tu pourrais douter de l'action du premier mobile,
si par une autre sphère il était contenu
car le lieu contient et voile
tout ce qui est visible ;
et la raison voit la première sphère contenue [ dans l'infini]
si bien qu'il n'est pas vrai que le ciel soit limité.

129-
Je dis que, lorsque quelque chose possède son propre espace,
cela ne signifie en rien qu'un autre espace le contienne,
ce qui réduirait ainsi le vrai ciel à peu de chose ;
un espace se maintient par accident,
il advient qu'en lui le mouvement,
d'où la vie tire son amour, s'éteigne.

135-
Chacune des natures angéliques meut
les neuf cieux par la vertu de sa volonté
en ne fatiguant pas sa substance pure.
Un mouvement requérant la force n'est pas éternel,
et bien au contraire, sous l'action du temps il se dénature,
ce qui ne se produit pas pour les mouvements éternels.

141-
Donc, si dans les intelligences incorporelles
la volonté se convertissait en force matérielle,
l'esprit divin ne se découvrirait plus à elles.
Chacune d'elles comprend, par la seule contemplation de Dieu,
toutes les choses évidentes et certaines,
comme nous le faisons en regardant dans un miroir.

147-
Au-delà de ce [premier] ciel, il n'y a pas de qualité,
ni même de forme, qui meuve l'intellect ;
mais notre foi veut que l'Amour Divin
demeure au-dessus, dans le royaume bienheureux
auquel nous conduit l'espérance sous l'effet
de la lumière du Créateur bienveillant,

153-
Dont a jadis traité ce florentin
que Béatrice y conduisit.
Mais le corps humain n'a jamais été divin,
ni ne le peut devenir, tout comme le gris sombre ne peut être blanc,
car il se renouvelle tout entier ainsi que le phénix
dans ce désir qui lui aiguillonne le flanc.

159-
Son peu de foi le conduisit
dans les autres royaumes, accompagné de son guide,
posant ses pieds jusqu'au centre de la terre;
et je sais qu'il ne revint jamais parmi nous,
car sa passion amoureuse l'y maintint pour toujours.
Je me désole pour lui en raison de son beau parler.

165-
La première intelligence noble meut
le premier ciel qui gouverne le mouvement.
A chaque fois les autres, qui tiennent verte notre palme,
en tournant se rénovent.
Cela permet que rien ne soit épargné par le mouvement,
de sorte que vive l'âme de tout vivant.
C'est pour cela que dans la figure de mort, à l'Ouest du ciel,
beaucoup d'âmes sont visibles.
 

Acerba I. 3

DES ÉLÉMENTS ET DE LEUR ORDONNANCE ET COMMENT LA TERRE SE TIENT AU CENTRE

173-
Le feu de cette étoile tourne
avec la sphère sur laquelle elle s'appuie
et par suite, il abonde dans celle du dessous.
Cette sphère étant toujours unique,
la partie supérieure tourne avec elle,
de même que les corps légers tendent vers le haut.

179-
Par nature, les corps lourds recherchent le centre,
c'est pourquoi les autres occupent les parties les plus basses.
La forme pure, exempte de toute qualité matérielle,
se cache à nos yeux et ne se voit pas,
seul ce qu'elle a réalisé est visible,
grâce à la vertu qui émane d'en haut.

185-
Le ciel sépare toute matière lourde :
celle qui a une forme sphérique est au centre,
tout comme le point que pose au milieu du cercle
celui dont le nom démontre ce qu'il fait.
Le but du ciel, d'où provient notre intelligence,
n'est pas visible du fond de l'univers.

191-
La plus petite étoile qui luit dans le firmament
est plus grande que celle qui est lourde,
et elle est comme un point
dans le ciel ; et ceci est vrai
pour les étoiles fixes que vous regardez
mais non pour celle de la sphère la plus basse.

197-
Puisqu'un corps ne peut en cacher un plus grand,
la Lune n'est pas plus grande
que la Terre qui voile sa lumière.
S'il n'en était pas ainsi, elle ne montrerait pas
toute l'ombre de la Terre qui s'étale à sa surface,
faisant, de temps en temps, disparaître sa beauté.

203-
Les animaux vivent sur un quart [de la Terre]
et les autres parties sont chaudes ou froides,
de sorte que la vie et les actes naturels
restent éloignés d'elles ; en vérité aucun corps vivant
n'y émet de parole ou de cri.
Que là demeure celui à qui la vertu déplaît.

209-
Ce quart se divise en sept parties
correspondant aux sept étoiles disposées jusqu'au sud ;
chacune projette vers les autres les ombres taillées par ses rayons.
Puisque le soleil tourne et que la lumière diminue,
chaque région ne reçoit pas [en même temps] ombre et lumière
comme on le voit dans le quatrième ou cinquième climat.

215-
La rotondité de la Terre en est la cause :
par suite, tous les êtres vivants ne voient pas en même temps,
la Lune perdre sa splendeur.
Celui qui se trouverait sous la lumière éternelle
des sept étoiles qui nous donnent la foi,
ainsi que les disposa notre Lumière éternelle,

221-
Pourrait se diriger vers les confins du monde
jusqu'à ce qu'il ne les voie plus ;
tout comme celui, qui depuis ce cercle second
situé dans la partie médiane,
se mettrait en route vers ces étoiles,
laisserait la seconde tramontane [petit chariot].

227-
La Terre est située entre deux pôles,
l'un situé au-dessus et l'autre opposé à lui :
la nature leur donna le même pouvoir.
Si l'un cessait d'exercer sa puissance,
l'autre nous tirerait vers le ciel,
car chacun agit comme un aimant.

233-
Notre intelligence nie ce que dit
l'opinion erronnée de ces gens
qui attribuent une triste origine à notre monde habité.
Elles vont parées de beaux animaux [brodés],
ces âmes ignorantes des actes de raison :
à ceux qui comprennent je ne dirai pas qui elles sont.

239-
La Terre est à égale distance de chaque point du ciel :
et ainsi, la lumière des étoiles offre
une égale splendeur à chaque regard humain.
Qu'elle tourne à l'est ou au milieu,
ou qu'elle tombe à l'occident,
chacun la voit de la même forme.

245-
Souvent, en raison de la transparence des sphères
notre regard se trompe :
quand l'astre est au zénith et apparaît clairement à nos yeux,
il les écarte de la vérité
car son rayon le fait paraître plus beau,
tout comme une lumière qui brille au loin dans l'ombre.

251-
Par nature, la Terre est placée
au milieu du ciel, comme le lourd est au centre.
Elle ne peut faire le plus petit mouvement,
car alors le corps lourd monterait.
Or la nature ne possède pas ce pouvoir,
ni ne fut jamais vaincue par un tel phénomène.

257-
Et s'il était possible que quelqu'un s'enfonce
depuis cette surface jusqu'en dessous
de telle sorte qu'il regardât l'autre hémisphère,
étant très léger, il se produirait une chose amusante :
il se tournerait vers le centre de la sphère terrestre,
les pieds vers nous et la tête vers le bas,
ainsi qu'il arrive à qui tombe
par accident, dans les eaux transparentes.
 

Acerba I. 4

DES ÉCLIPSES DE SOLEIL ET DE LUNE

265-
Arrête-toi ici, intelligence aux voiles déchirées
car ta valeur n'est pas suffisante pour être éclairée
sur ce qu'il te convient de croire,
et qui fait que Dieu qui donne souffle et lumière,
rend la nature universelle parfaite
et capable de passer de la puissance à l'acte.

271-
Intelligences, étoiles, mouvement et lumière,
régissent chaque nature que la sphère enveloppe,
et c'est de là qu'elle tire son existence.
S'il n'en était pas ainsi, la mort priverait de leur vertu
chaque animal vivant
et chacune des espèces végétales.

277-
Quand à nos yeux apparaît une nouvelle forme,
alors l'intelligence humaine se met en marche et interroge
jusqu'à ce qu'en elle la vérité se fasse jour.
Mais que celui qui ne se montre pas digne d'une telle lumière
ne dépasse pas les limites et n'élève pas son haut esprit
au-dessus des étoiles, au risque d'en périr.

283-
Ô spectacles de cette miraculeuse activité !
Car lorsque nous regardons les étoiles depuis notre petit cercle,
des merveilles se découvrent sans cesse à nous.
En ce monde, ne pas douter n'est pas une vertu,
au contraire, faire de l'ignorance humaine
la raison de tout, ne fait pas voir comme est le second [l'univers].

289-
Je dis que l'ombre de la planète des hommes
pose l'assise terrestre dans cette partie
qui n'est pas éloignée de notre qualité.
Le Soleil la prive alors de ses beaux rayons
car elle n'occupe pas la même place que Mars
qui de ses rayons peut [toujours] montrer le feu.

295-
De cette étoile se cache alors la beauté
des rayons reçus, si bien que pour nous,
la nature semble perdre tout attrait.
La vertu de tout ce qui vit, gémit de l'absence
de ce corps céleste qui recueille en lui
et renvoie la puissance de tous les cieux.

301-
Comme cet astre, la nature languit
pendant ce temps, elle perd sa vigueur,
car la puissance de l'astre ne se répand plus en elle.
Faute de cause, l'effet cesse :
alors ceux qui lui sont soumis, avec grande douleur
prennent le triste chemin de la mort.

307-
Dans le monde se produisent et se sont déjà produites
beaucoup de choses que je n'ai pas l'intention d'exposer,
parce que l'on verra et l'on a déjà vu
de belles âmes formées et éclairées
par la vertu du ciel qui ont envie de le faire,
en regardant combien le ciel a de pouvoir sur nous.

313-
Et de ses premiers rayons le beau corps céleste
peint la peur sur les visages humains
quand il se montre privé de sa lumière.
Si dans notre climat il cesse de luire,
dans les autres il donne ses rayons
car sa lumière ne meurt pas en toute région.

319-
Il y a deux cercles que certains nomment équant et déférent,
et qui, en se croisant,
se rejoignent dans les parties extrêmes.
Quand son corps a perdu sa lumière,
la première étoile tourne dans le premier cercle,
et le Soleil reste dans le partie opposée.

325-
Si la Terre est placée entre les deux étoiles,
c'est à cause d'elle que la Lune ne voit pas le rayon [du Soleil]
car sur son corps l'ombre s'étale.
Elle n'obscurcit pas toujours cette étoile,
ainsi qu'en témoigne notre vue
car sa silhouette parfois ne meurt qu'en partie.

331-
Le ciel tournant, viennent les heures tristes
où le beau rayon dans le Soleil se cache
la Lune étant accrochée en son coeur.
Quand se rejoignent l'un et l'autre cercle,
la beauté de cette lumière, qu'elle éloigne de nous,
se cache aux yeux humains ;
ainsi, quand cette beauté sublime se cache,
sous les étoiles meurt toute joie.
 

Acerba I. 5

DES TROIS PLANÈTES PRINCIPALES DOMINÉES PAR JUPITER, MARS, SATURNE ET DES TROIS
SECONDAIRES

339-
Si tu m'écoutes, je te dis que les étoiles chevelues
aux lumières variées que l'on voit
dans les airs, dessinent
le corps de chacun des sept cercles
pendant un temps déterminé, et sous l'effet de leurs mouvements,
l'air change et s'enflamme d'un trop plein de rayonnements.

345-
Que vienne le temps du règne de la triste étoile
et par le monde, dis-je, apparaîtront
des phénomènes nouveaux, graves et effrayants.
Que gémisse quiconque règne ou porte couronne
et que chaque animal doué de raison
craigne des événements cruels et mauvais.

351-
Celles qui dans l'air font pleuvoir la mort
ne montrent pas une couleur très sombre
mais infligent une grande douleur dans la vie.
Chacune d'elles est plus nuisible
lorsqu'elle naît à l'est et brille très fort ;
elle ralentit sa course si elle paraît à l'occident.

357-
Il en est une qui ressemble à un bel astre
et porte une lumière belle comme celle de la Lune,
car c'est le sixième ciel qui la guide :
elle fait germer la Terre et répand le bien.
Quand des trois étoiles, l'une est sous l'influence de Jupiter,
l'espérance d'un effet bénéfique augmente.

363-
A la vue de cette autre à l'aspect embrasé
dont la longue queue tourne continuellement,
que gémisse le genre humain.
Mars la dirige et Mars la conserve
si bien que sous les cieux elle attriste la nature,
car elle dessèche le sang dans les veines.

369-
Si sa tête est tournée vers l'orient,
l'air sera privé d'eau :
notre Terre, privée de pitié, sera soumise
aux incendies, aux pestes et aux famines ;
les yeux pleurant comme des fontaines feront pitié.
Oh belle et malheureuse nature, maintenant reprend courage !

375-
L'autre, celle qui toujours tourne et se déplace autour du Soleil,
se montre sous un horrible aspect ;
elle change le doux effet de chaque plante,
porte la mort dans tout royaume puissant,
et avec le plus grand mépris
prive de vie celui qui cultive la richesse.

381-
Elle capte la haute armée des rayons de l'astre funeste
et tandis que l'autre étoile la frappe,
elle exerce son influence sur l'humanité.
Si le mouvement de ce corps lourd se poursuit,
Oh puisse la mort venir du plus léger,
car elle nous ravirait de ses sinistres massues.

387-
Si Mars frappe de ses rayons
ou s'il règne dans le second ciel,
la mort viendra dans la jeunesse.
Tout espoir de paix, à ce moment-là, disparaît
si Mars frappe ce ciel de ses rayons.
Avec l'autre étoile, elle tue la vertu où elle se trouve.

393-
Il en est encore trois autres ; l'une d'entre elles
qui montre une crinière et de rayons naturels,
ressemble à l'étoile blanche ;
l'autre paraît avoir un corps rond,
du moins à ce qu'il semble à la vue humaine ;
l'autre est un peu imposante mais possède une longue queue.
Chacune en ce monde fait naître des choses nouvelles
et des actions privées de toute pitié.
 

Acerba I. 6

DE LA NATURE DES VENTS

401-
La lente étoile de la grande sphère
régit la Terre et lui conserve sa nature.
La première étoile met les eaux en mouvement et les répand.
L'étoile sans pitié fait naître le feu.
Mercure tient l'air dans sa forme
et provoque la tempête selon le lieu où elle se trouve et l'époque.

407-
Il y a quatre vents principaux :
l'un vient du premier coin de l'horizon
et conserve en nous les fonctions naturelles,
sa nature est tempérée,
située entre les deux qualités actives et belles ;
là où il souffle pendant le jour, il assainit la terre

413-
Si elle est entourée de montagnes et de collines,
et s'ouvre par une brèche dans la direction de ce premier coin,
( par exemple là où je suis né),
en faisant disparaître les eaux stagnantes et mauvaises
à la nature corrompue,
comme le montrent les basses plaines,

419-
Tôt le matin souffle la douce brise
qui emporte avec elle les ténébreuses vapeurs ;
s'il ne les dissipe pas, le soleil restera caché
car elles sont denses et issues de la terre ;
elles font pleurer l'air de sorte qu'il mouille le monde
si d'autres étoiles ne les repoussent pas ;

425-
Depuis le ponant le souffle des étoiles
se lève avec une voix tempétueuse
qui pousse l'air vers l'orient ;
sa qualité est de même nature que les eaux
et il s'en va par l'embouchure
comme le fait naturellement le vil animal.

431-
Des sept étoiles éternelles se lève
le souffle froid et sec par nature ;
sa vertu ne dédaigne pas un mouvement vif,
mais elle porte atteinte à ce qui retient les êtres vivants,
et inflige de manière inattendue l'aiguillon de la douleur :
je ne dis pas les autres effets connus.

437-
De cette partie où, dans sa course éternelle,
le Soleil dessine son angle le plus bas,
vient l'autre souffle qui imprègne l'air.
Avec la chaleur surgit l'humidité :
il ôte alors toute force aux êtres vivants.
Les êtres vivants se rendent bien compte de sa présence.

443-
Là où il souffle, il ôte toute force.
Ô peuples qui habitez la basse plaine
quelle lâcheté saisit alors votre âme !
Si son chemin passe au-dessus de nous,
le coeur hardi la tient cachée.
Notre nature ne veut pas qu'elle soit en nous.

449-
Les vigoureux êtres des montagnes,
où l'air affine ses voiles
et les remplit de vigueur,
ne connaissent pas la lâcheté en leur coeur fier,
parce que le savoir réside en eux,
et qu'un jugement aiguisé règne dans leur âme.

455-
A cause de ce vent l'air s'assombrit ;
il corrompt les liquides dans les veines
et provoque de nombreuses maladies que je connais.
Chacun souffle à des époques diverses
selon la place du Soleil parmi les autres étoiles
du cercle tordu parsemé d'animaux,

461-
Lequel se divise en quatre parties.
Tandis que le Soleil se déplace, ainsi voyons-nous
qu'une qualité en détruit une autre ;
ainsi à une époque donnée un ciel différent
apparaît sur la terre où nous vivons
et dans la région qui est éloignée du Soleil.

467-
Je reviens aux quatre vents dont je parlais,
et je laisse leurs membres [les constellations]dans ce mouvement ;
l'un s'arrêtant, son ennemi se lève
quand la lumière des étoiles fixes
est frappée par les corps célestes
réunis dans les parties opposées,
si bien que les quatre vents avec leurs membres
sont formés par cette force.
 

Acerba I. 7

DE LA PLUIE, GRÊLE, NEIGE, ROSÉE ET BRUINE

473-
Le Soleil tourne et fait se lever les vapeurs,
de cette terre vers le beau ciel serein ;
et l'air ensuite s'épaissit toujours plus.
Sous l'effet des rayons réfléchis puis du feu,
elles se condensent peu à peu en montant
jusqu'au milieu, là où le froid est le plus vif.

479-
Se trouvant au milieu de corps opposés,
l'eau se forme et descend comme tout ce qui est lourd,
ses parties condensées tombant sur terre.
Plus ce site du milieu est froid,
et plus chaque région subit
de violentes tempêtes de pierres gelées.

485-
Mais ici l'âme noble peut s'interroger :
comment peut-il se former de la glace lorsqu'il fait chaud,
et comment la saison qui lui ressemble peut-elle en être privée?
Je dis que la sphère qui possède le feu,
repousse le froid de son bras
et par ses coups le maintient en un seul lieu .

491-
De même les rayons de feu renvoyés
loin de l'air de notre terre
à l'horizon, s'assemblent et se lient ;
et quand règnent le Cancer puis le Lion
un froid plus grand s'installe dans le milieu,
c'est ainsi qu'il tombe de la grêle en cette saison.

497-
A cette saison les eaux qui proviennent du dessous de la terre
par les veines, sont froides,
car le chaud y repousse le froid qui naît en elles ;
et elles sont chaudes au temps froid
car la chaleur reste sous terre
et cela dure le temps que dure le gel.

503-
Mais quand règnent le Scorpion et les Poissons
cet air du milieu est presque tempéré ;
qu'en lui augmente la quantité de vapeurs
alors naît la neige avec des eaux calmes
parce que l'air s'est privé d'un de ses contraires
qui renforcerait le froid par ses excès.

509-
La puissance de la Lune provoque la pluie.
Si elle accomplit son mouvement en compagnie d'étoiles mauvaises,
elle laisse prévoir des temps pluvieux.
Un corps céleste maléfique qui envoie sa lumière
vers la Lune, provoque la tempête et nous amène l'eau,
jusqu'à ce qu'il se soit éloigné.

515-
Lorsqu'elles se meut avec les douces étoiles
elle fait fuir les nuages et le monde s'éclaire ;
grâce à cette clarté, les âmes se font belles.
Quand la Lune est en bonne position
tous les éléments se meuvent dans la joie
et ôtent toutes les tristes dispositions.

521-
La petite pluie de la rosée
ainsi que la gelée, se forment à partir
de la vapeur gelée que l'air renferme :
ces phénomènes produisent une vapeur légère,
froide et peu élevée, comme notre souffle
en produit en respirant lorsque notre nature dort.

527-
La Lune est mère de toute humidité.
Lorsqu'elle montre toute sa lumière
ou qu'elle se trouve en quartier, il semble
que la mer rugisse quatre fois entre le jour et la nuit ;
ainsi mène-t-elle l'eau en haut et en bas.
et je te dis ceci par études et expériences.

533-
Ainsi des êtres vivants elle déplace le sang
entre le jour et la nuit, comme fait la mer,
et l'homme s'attriste et la nature languit ;
c'est pourquoi en quelques heures les être humains
ressentent sans raison des peines amères
ou une allégresse provenant de vaines affections.
Donc la Lune, selon ce qu'elle reçoit,
forme les vents, l'eau et la neige.
 

Acerba I. 8

DU TONNERRE, DES ÉCLAIRS ET DES TREMBLEMENTS DE TERRE

541-
La première étoile avec Mars l'impitoyable,
provoque certaines saisons tempêtes et tonnerres,
le temps que l'une s'oppose à l'autre ;
le feu, envoyé par le cruel Mars, part
vers les nuages froids ce qui en fait jaillir
des sons aux voiles enflammées.

547-
Le tonnerre n'est rien d'autre qu'une flamme
qui pénètre dans la masse des nuages froids,
où l'un de ces éléments est vaincu par l'autre.
Tu en as un exemple avec les branches vertes
qui crépitent si le feu les atteint.
Maintenant écoute les phénomènes que je vais examiner.

553-
Le feu est contemporain des éclairs ;
mais comme la lumière précède le coup de tonnerre,
ils paraissent alors être produits en deux temps de façons différentes :
ceci est dû à la vue plus rapide que l'ouïe,
car l'esprit suit de très près les yeux :
c'est pourquoi notre vue est très rapide.

559-
Cela est démontré par un coup de tonnerre lointain,
car le son se produit en même temps que le fait,
mais il nous parvient si tard que l'ouïe en est la cause,
car elle ne suit pas immédiatement l'image présente,
qui parcourt le reste du chemin
avant que le premier son n'arrive à notre cerveau.

565-
Il peut y avoir un coup de tonnerre sans feu ardent,
à notre vue, dis-je, mais pas en réalité,
et cela se produit accidentellement :
lorsque l'air très épais s'obscurcit,
le vent enflammé se lève et produit
un violent tonnerre qui sans sortir [des nuages] s'arrête.

571-
Il peut se produire un éclair sans tonnerre,
lorsque le vent enflammé ne rencontre pas d'élément contraire,
comme on le voit dans le ciel serein.
Mais quand ces nuages sont denses,
alors le feu s'oppose à eux très fortement,
produisant des sons de ses trompettes activées .

577-
Si les sons sont espacés et sourds
c'est parce qu'ils ne sont pas contrariés :
ne trouvant pas de résistance, les coups sont rares.
Ce qui résiste est durement frappé
comme nous voyons que le fer coupe
et que sa couverture montre sa santé.

583-
Ces nuages et ces images
ne se produisent plus au-delà d'une lieue
et de huit stades : mets-toi cela en tête.
Il est des montagnes où lorsque tu te tiens au sommet
tu vois la pluie et la neige en-dessous,
et les rayons au-dessus, en regardant le ciel serein.

589-
La flamme légère détériore peu
les petites choses ; ainsi voyons-nous
ce qu'il advint accidentellement à Sarah :
portant sur sa tête un très grand nombre d'oeufs,
elle fut touchée par le feu du ciel
et ils restèrent sains comme chose fraîche ;

595-
Mais on trouva l'intérieur sans fruit
et rempli de vent, car la flamme
entra par un côté et détruisit leur contenu.
Avec l'air enflammé, des pierres tombent du ciel,
comme des flèches sans poids,
sous l'effet de la grande puissance engendrée par le feu.

601-
Non seulement des pierres, mais des morceaux de fer
sont en Allemagne, descendus
du ciel en feu : en ceci, je ne me trompe pas.
C'est pourquoi les épées des Allemands
font frémir chaque poil sur le dos
de quiconque observe leurs coups puissants.

607-
Chaque élément se déplace et se corrompt :
selon les changements des cieux
ils nous montrent des choses bizarres.
La terre tremble à cause des vents qu'elle renferme,
l'air et l'eau ont des mouvements perfides
lorsque les cercles se déplacent.

613-
Les vents reclus, qui ne peuvent
s'échapper de la terre, poussés par Saturne,
nous font ressentir les tremblements de terre.
Par grand froid et également par temps chaud,
les vents se cachent et ne vont pas alentour :
ainsi la terre reste calme et solide.

619-
Je ne dis pas qu'il ne puisse y avoir
de tremblement de terre en été et en hiver,
mais quand le chaud ou le froid montrent leur colère,
ils durent peu, car les vents privés de leur force,
ne commandent pas,
ces qualités les rendant secs.

625-
Les grands tremblements de terre arrivent pendant la douce saison
et ils ne cessent pas tant que la terre endurcie
n'est pas brisée par une telle force.
Ceci ne se produit pas toujours comme à Corinthe :
elle fut détruite par un vent léger,
se déplaçant avec colère, là en-dessous.

631-
Ainsi, montagnes, collines et abîmes
sont formés par les vents reclus
durs et denses qui soufflent sous terre ;
et même les eaux cachées au-dessous de nous
agissent ainsi, si tu te souviens
des parties du monde qui sont creusées.

637-
Aux grandes montagnes succèdent les grandes plaines
où les eaux qui les submergent
quittent les Alpes et les monts toscans,
et créent la basse plaine lombarde,
vers laquelle descendent la Romagne et la Toscane.
Maintenant suis l'exemple que je vais examiner.

643-
Si tu regardes les escarpements, tu vois que
beaucoup de montagnes sont transformées en êtres de pierre
car la nature se retire de la terre.
La puissance naturelle gouverne, compose
et transforme la terre en pierres et troncs solides ;
ceci s'explique par la magie blanche.

649-
C'est pourquoi j'ai vu dans le marbre dur
l'empreinte de feuillages qui, lorsqu'il se solidifia
restèrent comprimés au sein de sa masse.
En période humide, il se comporte comme cire sous un sceau ;
les parties dures montrent comment la nature,
qui ne dédaigne pas les formes, peint.

655-
Maintenant écoute mon propos sur les choses divines,
car la science n'a de valeur que si on se l'approprie :
une chose parfaite n'est pas sans but ;
la connaissance est le principe de tout bien ;
sois bon avant d'en avoir l'apparence ;
comprends et vois avec un esprit scientifique
que jamais l'éternelle et bienheureuse nature
ne fit de créature sans raison.
 

Acerba I. 9

DE L'ARC-EN-CIEL ET DES NUAGES FIXES

663-
L'arc-en-ciel que tu vois composé de lumières diverses
se peint toujours à l'opposé du Soleil
car son rayon lui procure sa forme.
Si l'arc est en orient, le Soleil se couche :
et vis et versa car le veut la raison
et il convient que tu te fies à ce que tu vois.

669-
L'arc-en-ciel n'est que la réflexion de rayons
entre les nuages d'eau épars :
il convient que cela pénètre ton intelligence.
Lumineux ou obscures, petits ou gros,
les nuages sont très variés
quand ils sont frappés par le Soleil.

675-
Cependant ils montrent différentes couleurs
comme par exemple tu pourrais voir
dans une bouteille de verre si tu as cure d'essayer :
en mettant de l'huile et de l'eau dans la bouteille de verre,
tu seras content de voir les couleurs
lorsque les rayons du Soleil la frappera.

681-
De la Lune, lorsqu'elle est complètement pleine,
l'arc-en-ciel se forme de nuit, mais rarement,
il s'obscurcit ensuite si l'air devient serein.
Souvent un halo blanc se forme autour d'elle ;
il change le temps clément en mauvais temps :
comme cela ne manquera pas de se manifester les jours suivants.

687-
Quand dans l'air tu verras beaucoup d'arcs-en- ciel,
ici cela se produit à midi,
et si tu le gardes présent à l'esprit,
tu verras dans peu de jours l'air se troubler
par la force de Mars ou de Saturne
si un autre ciel ne fait pas changer cela.

693-
Même les nuages immobiles que tu vois,
je ne veux pas les laisser sans t'en parler
afin que tu ne crois plus à des sornettes.
Comme l'anthrax attire toujours l'eau
par la vertu qu'il nourrit en lui,
ainsi fait le Capricorne qui aspire.

699-
Sa puissance aspire les vapeurs fines
les tirant toujours de l'air limpide du dessus,
et il semble que dans le ciel apparaisse la voie lactée.
Ô comme sont cachées les puissances naturelles
à notre condition humaine aveugle et ignorante ;
ô combien de chose admirables sont masquées
à notre intelligence qui abandonne le bien
pour suivre le monde que la mort éperonne.
 

Commentaire du Livre I

I. 1 : De l'ordonnance des cieux

La Terre est entourée de neuf cieux, dont le dernier constitue le Premier mobile, situé sous l'empyrée où réside Dieu.

Le Premier Mobile contient l'énergie vivificatrice qui met en mouvement et guide vers nous les lois de la raison (v.3). Ce pouvoir est le reflet de la qualité intrinsèque de Dieu dont les desseins ne nous sont pas accessibles (v.5).

Sous ce Premier Mobile, se trouve la huitième sphère, ou ciel des étoiles fixes, ou ciel du Zodiaque (v.13) ; son mouvement n'est pas uniforme et est décalé d'environ un degré par rapport au mouvement des sphères des sept planètes, situées au-dessous de lui (v.15).

Chaque sphère céleste est sous le commandement de substances incorporelles qui se délectent de l'harmonie produite par le mouvement des astres (v.7) ; cette harmonie est éternelle, gouvernée par Dieu ; de cet ordre universel découle la conservation de la vie sur Terre (v.9).

Les substances ont quatre qualités principales : la disposition, la puissance, la capacité à se modifier momentanément ou définitivement(passion), la forme ou loi de l'harmonie de leurs parties (v.16) ; c'est le huitième ciel, sous la dépendance de Dieu, qui produit ces quatre qualités.

Saturne occupe le septième ciel. Cette planète lente, qui met du temps pour accomplir sa révolution, exerce une influence néfaste sur la Terre (v.19) ; elle est la plus éloignée des planètes et lorsque les rayons solaires ne l'atteignent plus, elle n'est plus visible (v.55) ; lorsqu'elle est éclairée par le Soleil, elle provoque des catastrophes (tempêtes, guerres…) et affaiblit les Hommes (v.61).

Si elle se lève à l'Est, dans la constellation du Scorpion, on subit son influence mais si par la suite Jupiter domine, alors des choses étranges se produisent, comme le vol d'objets de plomb ou l'apparition de figures peintes dans les airs (v.67).

Elle influence également les autres corps célestes dont elle perturbe le mouvement ; elle repousse même ceux qui ne peuvent rivaliser avec elle. Elle cache également la beauté de son fils, Jupiter, à ceux qui observent avec l'astrolabe, afin de le punir de l'outrage qu'il lui a fait subir (v.73).

Elle exerce toujours une grande influence sur les animaux privés de raison, quelque soit sa position dans le ciel (v.79).

Le sixième ciel est celui de Jupiter dont la lumière réjouit l'âme si elle ne ferme pas les yeux(v.25).

Mars est sur le cinquième ciel ; cette étoile de feu se montre toujours féroce avec qui la provoque et ne présente aucun signe de la bonté divine. On peut voir, encore aujourd'hui, les effets des tempêtes qu'elle provoque (v.31).

Le quatrième ciel est la sphère du Soleil, source de notre vie, qui éclaire tous les corps célestes(v.37).

L'amour de la beauté est localisé dans le troisième ciel, ciel de Vénus. Grâce à elle, l'amour reste en nous, même après la disparition de l'être aimé(v.43).

Mercure sur la deuxième sphère, s'adapte à des dispositions d'esprit contraires et donne la connaissance qui libère des ténèbres (v.49).

La Lune de la première sphère est humide et froide (v.52).

Mais le plus beau des cieux est celui de Vénus qui nous pousse à l'amour de Dieu.
 

I. 2 : Des substances séparées et de quelques uns de leurs effets

Chaque ciel est sous l'emprise d'une intelligence séparée (ou nature angélique, ou intelligence incorporelle ou intelligence séparée), il y en a donc neuf, qui transmettent lumière et mouvement à la sphère qui leur est assignée. De l'Empyrée où elles résident à côté de Dieu, elles lisent dans nos pensées.

L'activité humaine, complexe, résulte donc de l'action de chaque sphère qui communique aux individus sur la Terre, mouvement et formes d'activités. Mais, ceux qui pour de multiples raisons, ne reçoivent pas leur influence, ne mènent pas une vie honorable; seule l'âme, en répondant à cette influence divine indirecte, peut permettre à l'homme de s'élever (v.93-105).

Le monde n'a pas de limite et les natures angéliques meuvent les cieux par un effet immatériel, sinon par les efforts fournis, elles se fatigueraient et le mouvement s'atténuerait ; dans ce monde illimité, le mouvement est éternel.
La pensée de ces natures angéliques est maintenue en activité grâce à la contemplation de Dieu, ce qui leur permet d'atteindre la connaissance infaillible (v.135-141).

Selon Averroès, il existe une dixième intelligence séparée, qui inspire la pensée en prenant l'âme de chacun dans le ciel de Mercure et agençant l'intellect particulier avec l'intellect agent universel. Il n'y aurait alors qu'une seule intelligence active pour tous les Hommes ; or, comme nous sommes mortels, les individus seraient exclus de la vie véritable qui est la pensée divine, seule la pensée universelle resterait éternelle (v.111-117).

Le royaume de Dieu est situé au-delà du Premier Mobile (neuvième ciel) ; nous y sommes guidés par l'espérance (v.147). Il est impossible que Dante y soit allé avec Béatrice car il serait alors devenu un corps divin. Avec son guide, Virgile, il visita les autres règnes (l'Enfer et le Purgatoire) et son manque de foi le conduisit même au centre de la Terre. Il est également impossible qu'il soit revenu de ce lieu, sa passion amoureuse devant l'y maintenir ; il ne dit donc pas la vérité (v.153-159).

Les formes vitales remontent jusqu'au ciel du zodiaque d'où elles redescendent sur Terre, sous de nouvelles apparences. Ce que l'on voit à l'Ouest, dans le signe du Scorpion, ce sont les âmes qui redescendent pour reprendre vie sur Terre(v.165).
 

I. 3 : Des éléments et de leur ordonnance et comment la Terre se tient au centre

Le feu produit par le mouvement des cieux, se forme en passant par Mars. Il vient ensuite s'accumuler entre la Lune et la Terre, où les trois éléments , feu, air et eau constituent une seule sphère et trois strates ; la strate supérieure, celle du feu, suit le mouvement des deux strates inférieures comme un corps léger qui flotte (v.173).

Les corps lourds tombent, c'est pourquoi l'eau et la terre occupent la partie la plus basse de cette sphère.

Dieu et les substances incorporelles ne possèdent pas les quatre qualités matérielles (chaud, froid, sec et humide) et nous ne pouvons donc pas les voir. Seules les substances particulières qu'elles produisent avec l'aide des cieux sont visibles (v.179).

Les cieux séparent le lourd du léger ; le lourd prend la forme d'une sphère et occupe le centre, tout comme le géomètre marque le centre d'un cercle (v.185).

La plus petite des étoiles fixes est encore plus grande que la Terre tout en n'étant qu'un point dans le ciel.

Un corps de petite dimension ne pouvant en cacher un plus grand que lui, la lune n'est donc pas plus grosse que la Terre qui, par son ombre, la cache complètement périodiquement (v.197).

Les animaux ne vivent que sur un quart de la surface de la Terre et les autres parties sont froides ou chaudes, ce qui les rend impropres à la vie. Les ennemis de toute vertu devraient demeurer dans ces régions (v.203).

Le quart habitable se divise en sept régions correspondant aux sept étoiles qui décrivent sept cercles du nord au sud ; comme le Soleil se lève et se couche et donc que la lumière augmente et baisse, l'ombre et la lumière ne se produisent pas partout en même temps (v.209) .

Cette diversité est due à la rotondité de la Terre et les éclipses de Lune ne s'observent pas en même temps (v.215)

Qui serait près du pôle sous l'éternelle lumière de ces sept étoiles ( la Petite Ours) qui représentent notre lumière éternelles[les quatre vertus cardinales et les trois vertus théologales] pourrait aller vers les confins du monde habité et ne les verrait plus.

Qui de l'équateur irait vers elles, passerait par la deuxième tramontane ou Petit Chariot (v.221).

La Terre possède deux pôles situés au-dessus l'un de l'autre et de même nature. Ils attirent la matière terrestre et si l'un cessait son activité, l'autre nous attirerait vers le ciel (v.227).

Notre doctrine repousse l'opinion qui, en niant l'action contraire des deux pôles, fait naître notre hémisphère de l'abîme. Il est inutile de nommer ces ignorants qui vont en habits brodés (comme les médecins !) (v.233).

L'oeil se trompe lorsqu'une étoile nous apparaît plus grande ou plus lumineuse, car la Terre occupant le centre de l'univers, une étoile brille de la même façon pour tous les hommes (v.239-245).

Selon les lois de la gravité, la nature oblige la Terre à être immobile au centre de l'univers (v.251).

Un corps lourd ne peut monter et quelque soit la direction dans laquelle elle se déplacerait, elle remonterait toujours vers le ciel ce qui n'est pas possible.

Si un être vivant tombait dans l'autre hémisphère, il tournerait sa partie la plus lourde vers le centre de la Terre, c'est-à-dire la tête, comme lorsqu'on tombe dans l'eau (v.257).
 

I. 4 : Des éclipses de Soleil et de Lune

Tout ce qui existe sous la sphère céleste, intelligences séparées et étoiles, en reçoivent et en conservent la lumière et le mouvement ; s'il n'en était pas ainsi, tout être vivant mourrait (v.271).

L'intelligence de l'homme cherche à connaître l'origine de toute chose nouvelle ; cependant il ne peut dépasser ses propres limites et s'élever au-dessus des étoiles car celui qui n'est pas digne de la lumière divine périt en voulant atteindre cette connaissance (v.277).

Qui lève les yeux pour regarder le ciel y découvre toujours des merveilles. Le doute est nécessaire et même c'est une erreur que de tout rapporter à notre jugement humain, bien peu élevé (v.283).

Lors d'une éclipse de Soleil, l'ombre de la Terre se projette sur la Lune qui nous est proche et lui cache les rayons du soleil ; ceci ne se produit pas pour Mars qui est toujours visible car disposé sur un plan supérieur oblique (v.289).

La lune ne montre plus la beauté des rayons du Soleil et la nature semble perdre toute sa beauté à nos yeux ; la vie n'est plus illuminée par la Lune dans laquelle se rassemblent toutes les influences des cieux, qui sont ensuite insufflées dans les vivants (v.295).

Les influences célestes n'atteignant plus la Lune et la nature, la cause de la vie est interrompue et les êtres vivants qui sont sous la dépendance de la Lune meurt (v.301).

Durant une éclipse, lorsque la Lune est voilée, ceux qui l'observent prennent peur. Cependant, elle peut être cachée sous nos climat et ne pas l'être totalement à d'autres endroits (v.313) et même, les habitants de climats différents peuvent ne pas la voir en même temps que nous (v.321).Selon la théorie de Ptolémée, la Lune est divisée en deux par le cercle équant et parcourt le cercle déférent.

L'éclipse de Lune se produit lorsque la Terre est entre le Soleil et la Lune ;

Il arrive un temps où la lune se trouve au centre du Soleil, puisque les cieux se déplacent et c'est l'ombre de la Lune qui se projette sur la Terre. Cela nous prive de lumière et attriste le monde terrestre.
 

I. 5 : Des trois planètes principales dominées par Jupiter, Mars, Saturne et des trois secondaires

Les comètes ont des luminosités différentes, ainsi que des formes de queue et de têtes ; elles parcourent les sphères pendant un temps bien déterminé pour chacune d'elles, et à leur passage, elles enflamment l'air (v.339).

Si Saturne domine, le passage d'une comète est un mauvais présage et tous les hommes, riches ou pauvres s'attendent à de terribles événements .

Ces comètes, bien que n'ayant pas un vilain aspect, portent avec elles la mort et infligent de grandes douleurs aux mortels ; elles sont d'autant plus terribles qu'elles viennent de l'est et brillent davantage, alors qu'elles ralentissent si elles se trouvent à l'Ouest (v.351).

Il en existe une qui est belle et brille comme la Lune, car elle est tempérée par Jupiter où elle a son orbite. Elle favorise la germination et distribue le bien sur la Terre. Sous l'influence de Jupiter, elle produira de grands effets (v.357).

Une deuxième est enflammée et possède une queue toujours en mouvement ; elle dépend de Mars et dessèche le sang dans les veines (v.369).

Si sa tête est tournée vers l'Est, l'eau s'évaporera de l'air et si la pitié divine ne vient pas au secours de notre mort, elle sera soumise aux feux, à la peste et aux famines (v.369).

La troisième est horrible à voir, elle tourne sans cesse autour du Soleil, dessèche les plantes, apporte la mort sur Terre et déshonore ceux qui possèdent des richesses (v.375)

Elle attire à elle les rayons de Saturne qui la blessent, et ainsi elle exerce son influence sur toute l'humanité ; si cette lourde comète continuait à descendre vers nous, alors sa queue nous entraînerait dans son tourbillon et la mort que la sphère supérieure pourrait nous envoyer serait plus douce (v.381).

Si le rayons de Mars nous atteignent lorsque cette troisième comète arrive, alors les jeunes mourront.

Il n'y a plus, non plus, d'espoir de paix si Mars se trouve dans la constellation du Taureau lors de son passage ; et s'il s'y ajoute l'influence de Mars, alors les vertueux seront corrompus (v.387).

Il y a encore trois autres comètes, une blanche à la queue fournie, une deuxième à la tête ronde et une dernière petite avec une grande queue. Ces trois comètes font apparaître des phénomènes étranges et des événements atroces (v.393).
 

I. 6 : De la nature des vents

Chaque élément possède sa planète : Saturne conserve la terre ; les eaux sont sous le gouvernement de la Lune, le feu dépend de Mars, l'air et les tempêtes de Mercure (v.401).

Il y a quatre vents principaux : l'un vient de l'est, il donne une chaleur tempérée là où il souffle, et la terre redevient salubre si elle est entourée de montagne ou de collines et si elle est ouverte vers l'Est ; il y fait également disparaître les eaux stagnantes (v.413).

Si le vent d'Est ne les chasse pas, des brumes se lèvent alors avec la brise matinale ; le Soleil en reste voilé car elles sont denses et imprègnent l'air d'humidité (v.419).

Les étoiles occidentales soulèvent des tempêtes qui poussent les masses d'air vers l'Est ; ce sont alors des avalanches d'eau qui dévalent des monts vers les plaines (v.425).

Des sept étoiles de la Grande Ours provient le vent froid et sec qui blesse les paresseux et provoque des maladies bien connues (v.431).

Le vent du Sud vient du Midi où le soleil est le plus bas ; il imprègne l'air de chaleur et d'humidité et importune les vivants (v.437).

Là où souffle ce vent, les habitants des plaines sont abattus, sauf dans la région natale de l'auteur où la vivacité des gens dissimule ses effets et où l'indolence n'est jamais signe d'avilissement (v.443)).

Bien au contraire, les montagnards endurcis par l'air de leur ciel ne s'avilissent pas et gouvernent leur âme avec sagesse (v.449).

Ce vent produit de l'humidité dans l'air et corrompt l'humidité du sang ce qui est la cause de maladies .

Chaque vent souffle à une époque déterminée selon la place que le Soleil occupe dans le zodiaque (v.455).

Le zodiaque se divise en quatre parties. Les conditions de vie changent lorsque le Soleil change de quadrant : ce sont les différentes saisons qui possèdent des caractéristiques différentes.

Chaque trimestre, il y a un ciel différent sur la Terre, mais également dans la région zodiacale, opposé au Soleil et que nous voyons à minuit (v.461).

Un des vents cessant de souffler, son contraire se lève lorsque les étoiles fixes du zodiaque sont stimulées par les planètes qui leur sont opposées ; pour former les quatre vents ; les quatre points cardinaux, où se rassemblent les influences des planètes et des signes du zodiaque, sont donc impliqués.
 

I. 7 : De la pluie, grêle, neige, rosée et bruine

Le soleil en tournant fait se lever les vapeurs et l'air continue à s'épaissir. Ces vapeurs qui s'élèvent, sont tirées vers la sphère du feu et arrivent entre la sphère de l'eau et celle de l'air où il fait froid, et se condensent (v. 473).

Se trouvant entre le feu et la Terre, " les agents extrêmes ", la vapeur se transforme en eau qui tombe sur la terre. plus cet espace médian est froid, plus il tombe de grêle (v.479).

La question est de savoir comment la glace peut se former par temps chaud (l'été). L'auteur répond que la sphère du feu repousse son contraire, c'est-à-dire le froid et le maintient en un point fixe (v.485).

Ainsi, les rayons de feu sont repoussés de la terre, froide par nature, vers la sphère de l'air et se regroupent à l'horizon. Lorsque le Soleil se trouve dans le signe du Cancer et du Lion, la partie médiane, coincée entre la sphère du feu et les rayons réfléchis, est plus froide et il grêle (v.491).

Les eaux de source sont froides en cette période car le froid se concentre en elles ; et elles sont chaudes en hiver car la chaleur est repoussée sous terre (v.497).

Mais, lorsque le Scorpion et les Poissons dominent (début de l'automne), cette partie médiane est tempérée. Cependant, s'il y a trop de vapeur, il neige ou il tombe des pluies fines car l'air s'est débarassé de l'excès de chaleur (v.503).

Les pluies sont sous l'influence de la Lune. Si elle est accompagnée d'étoiles maléfiques, les pluies dominent. Si un corps céleste maléfique irradie la Lune de sa lumière, alors il se produit des tempêtes et des pluies jusqu'à ce qu'il se soit éloigné (v.509).

Lorsqu'au contraire, la Lune se déplace en compagnie d'étoiles bénéfiques, les nuées se dispersent et la lumière inonde la Terre, procurant l'allégresse chez les humains. Avec la Lune en bonne position, tous les éléments sont joyeux et la tristesse est supprimée (v 515).

La rosée se forme à partir des vapeurs froides enfermées dans l'air ; c'est également l'origine de la bruine. Ces phénomènes se produisent lorsque la vapeur est fine, froide et peu élevée, comme notre souffle durant le sommeil (v 521).

Toute l'humidité est sous la dépendance de la Lune ; durant la pleine Lune ou durant le premier ou le troisième quart, la mer se gonfle quatre fois par jour. La Lune est donc responsable des marées (v.527).

De la même manière, elle abaisse le sang des êtres vivants et le fait remonter vers le crépuscule ; cela provoque langueur et tristesse ; les êtres humains sont alors, sans motif, atteints d'angoisse ou d'allégresse (= les lunatiques ?). Donc, la Lune, selon les influences qu'elle reçoit des cieux, gouverne les vents et les précipitations atmosphériques (v.533).
 

I. 8 : Du tonnerre, des éclairs et des tremblements de terre

La Lune et Mars sont responsables du tonnerre et des tempêtes. Le feu poussé par Mars se dirige vers les nuages froids, ce qui provoque un son accompagné de feu (v.541).

Le tonnerre n'est pas autre chose que du feu lancé dans la masse froide des nuages ; l'un de ces deux éléments opposés chasse l'autre (v.547).

L'éclair et le tonnerre sont contemporains, même si la lumière semble devancer le son ; cela est dû à la rapidité de la vision (car l'âme suit de très près la vision) par rapport à l'audition(v.553).

La preuve nous en est fournie par un coup de tonnerre lointain ; le son arrive si longtemps après l'éclair que l'on accuse l'ouïe d'être de mauvaise qualité ; la lumière arrive au cerveau avant que l'on ait conscience de l'existence d'un son, bien qu'ils soient contemporains lors de leur émission (v.559).

On peut également entendre le tonnerre sans voir l'éclair ; ce dernier existe cependant, mais les nuages sont trop denses pour le laisser sortir (v.56)585).

Les éclairs sans tonnerre se produisent lorsque le vent enflammé ne rencontre pas d'élément contraire, c'est-à-dire de nuages, comme il arrive dans un ciel serein. Mais si les nuages sont denses, alors il y a un grand bruit (v.571).

Si les sons sont faibles, rares, brefs, ils se produisent dans la même direction que les nuages et ne trouvent donc pas d'opposition (v.577).

Ces nuages et ces éclairs ne se forment pas au-dessus d'une hauteur de 1 ligue et 8 stades ; en montagne tu peux donc voir la pluie et la neige en bas et les rayons du soleil en altitude (v.583)).

L'éclair n'endommage pas les objets fins et peu denses ; ainsi les oeufs que portait Sara sur sa tête, n'ont-ils pas été endommagés par la foudre (v.589).

Mais l'intérieur de la coquille était vide, leur contenu ayant été détruit par la flamme. Du ciel tombent des pierres, comme des étincelles de feu (v.595).

En Allemagne, ce sont des morceaux de fer qui sont tombés du ciel, ce qui rend les épées allemandes redoutables (v.601).

Chaque élément se déplace et se transforme ; si le vent s'enferme dans le sous-sol, il y a des tremblements de terre ; l'air et l'eau se déplacent avec violence lorsque les sphères célestes changent de position (v.607).

Les vents qui ne peuvent ressortir de la terre provoquent des tremblements de terre sous l'effet de Saturne ; l'hiver et l'été, les vents sont cachés et la terre reste calme (v.613).

Cela ne signifie pas qu'il ne puisse se produire des tremblements de terre en été et en hiver, mais ils durent peu, car les vents privés de leur force (car asséchés par l'excès de chaleur ou de froid), ne peuvent pas sortir (v.619).

Les grands tremblements de terre ont lieu pendant les saisons douces( printemps et automne) et cela ne se produit pas toujours comme à Corinthe où une partie du territoire a été enfouie sous la mer (v.625).

Les montagnes, les collines et les abysses sont constitués par des vents renfermés, denses et qui soufflent sous terre. Les eaux profondes causent ces cataclysmes en se déplaçant dans les cavernes (v.631).

Les grandes plaines succèdent aux grandes montagnes. Les eaux descendant des Alpes et de l'Apennin toscan forment la plaine lombarde vers laquelle tombent la Romagne et la Toscane(v.637).

Beaucoup de montagnes, formées de terre au départ, sont transformées en pierre car la force vitale s'est retirée de cette terre ; cela s'explique par la magie blanche.

J'ai vu les empreintes de feuilles dans le marbre ; elles y restèrent enfermées lorsqu'il s'est formé ; les parties molles ont ensuite été désagrégées (v.649).
 

I. 9 : De l'arc-en-ciel et des nuages fixes

L'arc en ciel est composé de plusieurs couleurs et se présente toujours à l'opposé du Soleil(v.663)

Ce n'est rien d'autre que la réflexion des rayons du Soleil dans des nuages peu nombreux (v.669).

Il présente diverses couleurs comme tu peux le voir dans une bouteille en verre remplie d'un mélange d'eau et d'huile, frappée par les rayons du Soleil (v.675).

A la pleine lune, il se forme un halo qui disparaît lorsque l'air est limpide. Souvent elle est entourée d'un halo blanc, de mauvaise augure pour le temps à venir.(v.681).

Si tu vois beaucoup d'arcs-en-ciel à midi, le temps sera perturbé par Saturne ou Mars, si d'autres corps célestes n'interviennent pas (v.687).

Les nuages stationnaires sont dus à l'action du Capricorne qui attire l'eau (v.693).

Cette constellation absorbe les vapeurs des hautes strates et forme un nuage identique à la voie lactée (v.699).
 


Référence de la page :
Cecco d'Ascoli: L'Acerba (Introduction et Livre I)
http://cura.free.fr/docum/22cecco1.html
(traduction de Marie-Claude Ramain)
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